Le suivi du Desman des Pyrénées
Décrit pour la première fois en 1811, le Desman des Pyrénées reste mal connu. Récemment classé "En danger" sur l'échelle de l'UICN, le Desman des Pyrénées est aujourd'hui menacé par la dégradation de son habitat, les activités humaines et la recrudescence de ses prédateurs.
Dans le cadre du Plan national d’actions en faveur du Desman des Pyrénées et du programme européen Life + Desman, le Parc national des Pyrénées s'engage, depuis plus de 10 ans, dans la recherche de connaissances et de solutions favorables à la sauvegarde de l'espèce sur son territoire.
Suivi du Desman des Pyrénées - J. COMBES - Parc national des Pyrénées
Tendance et évolution des populations de Desman des Pyrénées
-60%
de territoires de présence du Desman dans le Parc national
-60%
de territoires de présence du Desman dans les Pyrénées
11,4%
des cours d'eau du Parc national prospectés
170 km
parcourus à la recherche d'indices...
Lancement du suivi : 2010
Périodes de suivi : actualisation de la carte de répartition en continu
Dispositif : prospection, analyses de terrain
Synthèse des résultats :
Sur la période 2010-2023, 170 kilomètres de linéaires de cours d’eau ont été prospectés sur le territoire du Parc national (soit 11,4 % des cours d’eau permanents du Parc national) à la recherche d'indices de présence du Desman.
Les résultats ne sont pas rassurants pour la survie de cette espèce rare, discrète et encore mal connue :
Sur les 20 - 30 dernières années, la régression du Desman est estimée à environ 60 % dans les Pyrénées.
Sur le territoire du Parc national des Pyrénées, la situation est variable selon les vallées. En Béarn, les effectifs paraissent encore notables tandis qu’en vallée du Rioumajou ou à l’amont du village de Gavarnie, l’espèce semble avoir disparu.
Face à ce constat partagé en Espagne et au Portugal, l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a fait passer le Desman des Pyrénées de la catégorie « vulnérable » à « en danger » dans son classement des espèces menacées en 2021.
Répartition du desman, par zone hydrographique, à l’échelle du Parc national des Pyrénées
Le Parc national des Pyrénées comme site d’expérimentation
Les premières recherches sur l'espèce, basées sur l’observation de crottes caractéristiques déposées sur les pierres émergées au milieu du cours d’eau ou sous les berges, furent réalisées dans les années 1990 par un précurseur, Alain Bertrand. Il établit alors la carte de répartition de l’espèce sur les Pyrénées françaises.
20 ans plus tard, à l’occasion du Plan national d’actions en faveur du Desman des Pyrénées 2010-2015 (PNA 1) lancé par le Ministère en charge de l’écologie et du programme européen Life + Desman établi sur la période 2014-2020, un travail d’actualisation de l’aire de répartition du desman a été réalisé. Aujourd'hui, le Parc national des Pyrénées a été désigné comme terrain d'expérimentation de nouveaux dispositifs de recensement.
Pour compléter les méthodes de suivi classiques basées sur la recherche de crottes, des dispositifs complémentaires ont été testés sur le territoire du Parc national. Il s’agit :
- Des radeaux à empreintes testés sur les lacs d’Ayous où la présence de desman est avérée. Ce dispositif n’a malheureusement pas donné satisfaction.
- De nasses à anguilles adaptées pour la capture du desman la nuit. Ce dispositif lourd à mettre en place n’a pas permis de révéler la présence de desman sur des secteurs où la recherche de crottes n’avait pas fonctionné.
- Des tunnels à fèces censés favoriser le dépôt de crottes et la conservation du matériel génétique. Ce dispositif est en phase de test dans le cadre du Plan d'Action National Desman n°2 (2021 - 2030).
Test des radeaux à empreintes aux lacs d'Ayous - S. ROLLET - Parc national des Pyrénées
Tunnels à féces - S. ROLLET - Parc national des Pyrénées
Nasses à anguilles - S. ROLLET - Parc national des Pyrénées
Identifier les causes de mortalité
Chaque cadavre retrouvé est autopsié par les vétérinaires du Groupe de Recherche et d’Étude pour la Gestion de l’environnement (GREGE) et de l'Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse (ENVT).
7 cadavres ont été autopsiés depuis 2009 :
- 4 ont été victimes de morsures de petits carnivores,
- 1 a été retrouvé avec un hameçon dans le dos,
- pour les 2 autres, les causes de mortalité sont indéterminées.
Des inventaires et des opérations d’éradication du Vison d’Amérique, espèce exotique prédatrice du Desman sont envisagées. Des actions de sensibilisations des utilisateurs des cours d’eau ont été engagées et il est demandé aux habitants de ne pas laisser leurs chats domestiques errer aux abords des cours d’eau la nuit, période principale d’activité des desmans.
Avenir de la recherche & préservation du Desman des Pyrénées
Cabane fromagère de La Hosse - vallée d'Ossau - M. HERVIEU - Parc national des Pyrénées
Fabrication du fromage - C. BROCAS - Parc national des Pyrénées
Et la suite ?
Une actualisation de la carte de répartition du Desman des Pyrénées est envisagée sur la période 2021-2030 dans le cadre du PNA2. Il ressort également que le Parc national des Pyrénées doit protéger ses « hots spots » à desman comme les lacs d’Ayous qui constituent le seul site des Pyrénées où la présence régulière du desman en milieu lacustre est avérée.
Quatre sites dits « clés » avec des populations encore notables sont identifiés sur le Parc national des Pyrénées :
- Bious-Ayous,
- Marcadau, Aulon,
- vallon d’Estibère dans le Néouvielle.
C’est sur ces sites que les études visant à améliorer la connaissance de l’espèce doivent être engagées (test de nouveaux protocoles de suivis, suivi génétique, radiopistage, etc…).
En parallèle, des actions de gestion sont entreprises pour préserver l’habitat et les populations présentes (exemple : traitement du lactosérum en sortie de cabane fromagère, destruction du Vison d’Amérique, prise en compte de l’espèce dans les activités de sports et loisirs).
Mise en place d'un système de traitement du lactosérum sur la cabane de La Hosse en vallée d'Ossau - S. ROLLET - Parc national des Pyrénées